Evita Muzic : « Je me surpasse encore plus »

Crédit photo FDJ-Nouvelle Aquitaine-Futuroscope

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Voilà Évita Muzic de retour au premier plan. La Franc-Comtoise - installée à Grenoble (Isère) depuis près de deux ans - a terminé, dimanche dernier, 2e du Tour de Burgos, derrière Juliette Labous, autre Franc-Comtoise qu’elle côtoie depuis ses plus jeunes années sur le vélo. Elle a ainsi contribué à un moment marquant pour le cyclisme féminin tricolore avec ce “doublé” sur une épreuve du WorldTour (voir classements). Bien au-delà de cette statistique flatteuse, la Championne de France sur route en titre peut surtout se féliciter d’afficher une telle condition physique, à peine plus d’un mois après son retour à la compétition. Voilà qui est de bon augure pour les événements à venir et, en premier lieu bien sûr, le prochain Tour de France. Entretien avec la grimpeuse de la FDJ-Nouvelle Aquitaine-Futuroscope. 

DirectVelo : Cinq semaines après avoir enfin pu lancer ta saison 2022, te voilà sur le podium d’une épreuve WorldTour !
Évita Muzic : Je ne m’attendais pas à ça. J’ai pris mon mal en patience tout l’hiver et je me doutais qu’il me faudrait du temps pour revenir au niveau après ma blessure (lire ici). Mentalement, j’ai pris un coup au moral lors de ma course précédente, à l’Itzulia (le Tour du Pays Basque, NDLR). J’avais bien commencé la course mais j’ai eu un coup de moins bien les deux derniers jours. J’avais sûrement besoin de retrouver l’habitude d’enchaîner les jours de course. Dans ces conditions, j’ai abordé le Tour de Burgos avec l’idée de travailler pour l’équipe et de continuer à monter en puissance. Mais finalement, je suis allée chercher cette 2e place d’étape, le troisième jour, et ça m’a fait beaucoup de bien. En quelque sorte, ça m’a servi de déclic.

« J’AVAIS PEUR QUE ÇA ME LÂCHE »

Tu as ensuite été en mesure de jouer la victoire finale lors de l’arrivée au sommet des Lagunes de Neila, le lendemain…
Je ne pensais pas pouvoir faire aussi bien. Après ce que j’avais fait la veille, j’espérais un Top 10. Mais dans la montée finale (11,9 km à 6,2 %), j’ai senti que ça n’allait pas trop mal, puis j’ai vu Mavi Garcia craquer (l’Espagnole était alors porteuse du maillot de leader du classement général, NDLR). Pendant un temps, je me suis retrouvée leader virtuelle de la course et j’avais de bonnes sensations. C’est monté assez vite tout le long et comme je n’avais pas monté un col pareil depuis longtemps, j’avais peur que ça me lâche sur la fin.

Finalement, tu as dû laisser filer Demi Vollering et Juliette Labous…
Juliette était très forte. Je n’ai pas pu prendre les roues quand elles y sont allées toutes les deux. Après coup, j’ai essayé d’y aller, puis de faire l’effort en roulant fort pour limite la casse. En gérant bien ma montée car, encore une fois, je n’avais pas réalisé ce genre d’effort depuis longtemps et je ne voulais pas me mettre dans le rouge au risque d’exploser. J’ai quand même voulu essayer de revenir. J’ai pu compter sur le soutien de Cecilie (Uttrup Ludwig) qui a roulé avec moi. Je ne me suis pas écroulée mais je savais que je n’avais que trois secondes d’avance sur Juliette au général et que ce ne serait pas suffisant car je ne l'apercevais plus devant moi. Faire 3e de l’étape et 2e du général, c’est quand même très bien pour moi dans ce contexte-là. 

C’est aussi une petite ligne d’histoire, que vous avez écrite avec Juliette Labous en réalisant un doublé français sur une épreuve du WorldTour féminin !
Je suis vraiment contente pour elle. Je préfère que ce soit elle qui gagne plutôt que la plupart des autres filles du peloton comme (Demi) Vollering (lauréate de la dernière étape et 3e du général, NDLR). On est liées depuis nos jeunes années sur le vélo en Franche-Comté. On a fait notre premier podium en WorldTour ensemble, déjà à l’époque (Évita Muzic avait remporté la dernière étape du Tour d’Italie 2020, en échappée, pendant que Juliette Labous terminait 3e de cette même étape, NDLR). Et là on fait 1 et 2, c’est marrant ! Cela dit, elle est plus régulière que moi. Mais j’espère que ça changera (sourire). 

« PROFITER D’UNE CERTAINE FRAÎCHEUR »

Après avoir vu tes coéquipières enchaîner les grosses performances depuis le début de saison, tu commences à mettre toi-même ta pierre à l’édifice !
J’arrive à tirer mon épingle du jeu, sans avoir été désignée leader de l’équipe. Toutes les filles marchent très fort : Marta (Cavalli), Cecilie (Uttrup Ludwig), Clara (Copponi) et toutes les autres. Tout ça nous pousse vers le haut. On a clairement passé un cap. Maintenant, on va sur chaque course pour la gagner et presque toutes les filles de l’équipe peuvent espérer le faire. Le collectif est très solide. Et surtout, on se fait confiance et on est soudées. On se donne à 100% les unes pour les autres sans compter nos efforts. Il y a une belle émulation et une grosse vague positive. On est sur le podium pratiquement tout le temps, ça fait super plaisir. 

Tu vas maintenant aborder une période particulièrement importante avec un regain de confiance !
Je vais passer une semaine à la maison et ça va me faire du bien car je n’ai pas vu mes parents depuis un bon moment avec l'enchaînement des courses. Je vais aussi devoir répondre à pas mal de sollicitations médiatiques, des tournages en vue du Tour de France etc. Ce n’est pas ce que je préfère (sourire) mais ça fait partie du jeu, et du job. Les courses vont ensuite s’enchaîner. L’objectif principal, bien sûr, c’est le Tour. Et ça me rassure de voir que je suis déjà très en forme. Avec de la fraîcheur physique et mentale. L’Itzulia (le Tour du Pays Basque, NDLR) m’a fait du bien aux jambes, le Tour de Burgos m’a aussi fait du bien dans la tête. Le fait d’avoir vécu des moments difficiles cet hiver m’a fait passer un nouveau cap. Je me surpasse encore plus sur les courses, maintenant.  

Quel va être ton programme jusqu’au Tour de France ?
Je vais enchaîner des courses qui me conviennent sur le papier. D’abord, la nouvelle Alpes Grésivaudan Classic. Je ne pensais pas pouvoir y participer comme l’équipe n’y sera pas mais finalement, je disputerai la course avec l’équipe de France. L’organisateur tenait à ce que je sois là et ça me fait également plaisir, surtout que ce sera à la maison. Il y aura ensuite le Mont Ventoux et le Tour de Suisse avec, entre temps, un stage. Puis le Championnat de France, mais seulement la course en ligne et non pas le chrono cette année, et donc le Tour. Ce sera un bel enchaînement. Je vais sûrement pouvoir profiter d’une certaine fraîcheur que n’auront pas d’autres filles qui ont enchaîné depuis le tout début de saison.

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